Critique Comics Haunt

7
Haunt

par Ben-Wawe le mer. 3 nov. 2021 Staff

Belle intégrale pour une série bourrine agréable, un Expendables surnaturel qui hélas perd un peu ses bonnes idées en cours de route

Delcourt propose L’intégrale Haunt dans une édition réussie, même si le terme d’intégrale n’est pas forcément adéquat. Le tome republie en bloc les 18 premiers épisodes d’une série en ayant eus 28, parce que l’équipe créative change au n°19 pour modifier l’atmosphère et abandonner les intrigues développées jusque-là.
Delcourt se concentre ainsi sur l’essence même de Haunt, par ses auteurs originaux, des noms forts dans l’industrie et les adaptations comics.

La série Haunt est en effet lancée par Todd McFarlane, Monsieur Spawn, et Robert Kirkman, Monsieur Walking Dead et Invincible. Il y retrouve le dessinateur de ce dernier, Ryan Ottley, et Greg Capullo, avant qu’il devienne une star DC avec Batman puis Batman : Métal.
L’ensemble est imaginé après la Comic-Con de San Diego en 2006, quand Robert Kirkman, « caché » dans le public, demande à Todd McFarlane pourquoi il ne créé pas d’autres comics. Todd McFarlane considère avoir produit « son Mickey Mouse » avec Spawn, et ne se sent pas l’intérêt d’introduire d’autres personnages-stars.
Tous deux décident de nourrir ensemble l’univers Spawn, et Haunt n°1 sort en 2009. Robert Kirkman scénarise, Greg Capullo et Ryan Ottley se partagent le dessin, Todd McFarlane réalise les couvertures et l’encrage avec Jonathan Glapion.

Mais
Haunt, de quoi ça parle ?
De Daniel et Kurt Kilgore, frères fâchés depuis que le second a « piqué » Amanda, la petite-amie du premier. Ils se sont mariés, alors que Daniel est devenu un prêtre blasé et cynique, fumeur, qui voit plusieurs fois par semaine Charity, une prostituée. Daniel entend aussi Kurt en confession, malgré leur différend, afin d’éviter aux autres prêtres de subir ses péchés.
Kurt Kilgore est en effet un agent secret qui multiplie les actes violents pour une agence mystérieuse. Kurt est tué durant une mission où il devait récupérer le Dr Schillinger, savant fou abusant de volontaires pour créer des soldats parfaits, et ses notes.
Mais Kurt ne disparaît pas : son âme se greffe à celle de Daniel, seul à le voir. Tous deux peuvent faire apparaître une armure ectoplasmique, qu’ils peuvent utiliser pour bondir, s’accrocher aux murs, lancer des excroissances comme armes ou filins.
Les frères Kilgore sont ainsi forcés de collaborer pour protéger Amanda, menacée par le mercenaire Cobra et son employeur, le massif Mr Hurg, obsédé par l’alimentation saine. Daniel découvre l’univers de son frère, notamment ses collègues, mais aussi sa maîtresse, Mirage, alors que le mystère sur la combinaison demeure au fil des événements violents.

On le comprend, Haunt assume pleinement l’héritage de l’univers Spawn.
La série est bourrée d’action, de violence brutale, de sang, de mutilations, et d’humour noir. Cobra, mercenaire initialement badass, est particulièrement maltraité et humilié, pour faire rire grassement le lecteur. L’orientation surnaturelle est très présente, les événements sont très noirs.
Les femmes sont très sexy, pas forcément dénudées mais il y a plusieurs « plans culottes », autant dans les couvertures que les épisodes. Le sexe est aussi présenté grassement, notamment ce passage un peu lourd où Daniel couche des heures avec Charity, au grand dam de sa colocataire.
Surtout, Haunt reprend directement l’influence initiale de l’univers Spawn : Spider-Man, pour le graphisme et les mouvements. Si Al Simmons a déjà beaucoup du Tisseur dans ses postures initiales, le doute n’est pas permis pour son petit frère ! Haunt a une combinaison extrêmement proche de celle de Peter Parker, tous ses mouvements et toutes ses poses sont similaires. Les auteurs ont cependant l’intelligence de cesser là l’influence, car Daniel & Kurt sont bien loin du voisin préféré des New-Yorkais dans le caractère et les réactions, ce qui rend la lecture agréable.

L’intégrale Haunt est en effet très dynamique et fluide. Les pages se tournent rapidement, les rebondissements s’enchaînent et fonctionnent bien. Les scènes d’action sont bien réalisées par Greg Capullo, déjà passé sur Spawn, et Ryan Ottley, avec l’encrage uniforme de McFarlane et Glapion.
Robert Kirkman propose un scénario d’action assez bourrin, mais qui lui aussi fonctionne plutôt bien. On ne s’ennuie jamais et, si on n’est pas réfractaire aux aventures violentes et un peu grasses, l’ensemble donne le sourire et emporte au fil des pages.

L’intégrale Haunt est ainsi très proche du plaisir régressif des meilleurs films Expendables, avec juste l’ambition d’amuser et de faire rire lourdement. Dommage que la série perde beaucoup d’idées en cours de route.
Daniel Kilgore en prêtre blasé obligé de collaborer avec un frère qu’il déteste, c’est un principe super ! Mais cela disparaît bien trop vite, d’abord par l’oubli de son statut religieux dès le premier quart du récit. Ensuite parce que la réconciliation fraternelle est elle aussi expéditive.
La relation avec Charity se normalise alors qu’il aurait pu être intéressant de creuser plus ce lien au-delà des normes. Idem pour Mirage et Amanda, trop abandonnées alors qu’elles étaient très liées à Kurt.
La combinaison ectoplasmique reste trop mystérieuse, même si un épisode sur la fin donne quelques pistes. Le fait que quasiment personne ne s’interroge dessus interroge un peu, aussi.
Enfin, les rebondissements s’enchaînent mais restent quand même très semblables. Mr Hurg est emprisonné plusieurs fois et s’échappe facilement, quasiment avec les mêmes répliques… un peu redondant, ce qui finit par gêner la lecture en bloc. Tout comme une fin qui n’en est pas une, pour une conclusion qui n’achève rien.

En bref

L’intégrale Haunt est une lecture fluide, dynamique et très agréable pour quiconque apprécie l’univers Spawn et les récits d’action violents, un peu lourds, un peu gras. Les bonnes idées de base sont hélas trop vite mises de côté, pour des rebondissements divertissants mais un peu redondants. Une bonne lecture en bloc pour les fans de bagarre et de Todd McFarlane.

7
Haunt
Positif

Un rythme narratif réussi pour une lecture très dynamique.

Des aventures et des bagarres agréables et bien réalisés, par le scénariste et les dessinateurs.

Un comic-book d’action réussi.

Negatif

L’abandon des bonnes idées de base.

Des rebondissements un peu redondants.

Le manque d’explications sur la combinaison, et une conclusion qui appelle une suite.

Ben-Wawe Suivre Ben-Wawe Toutes ses critiques (81)
Partager :
Commentaires sur cette critique (0)
Laissez un commentaire