Critique Manga Nude Model

6
Nude Model

par Tampopo24 le mar. 11 juil. 2023 Staff

Croquis d'artiste

Avec une politique d'auteur que Pika semble mettre autour de Tsubasa Yamaguchi, ce qui s'y prête bien vu ses thématiques sur l'art, nous voici en présence d'un deuxième oneshot commis par celle-ci, un oneshot qui risque d'en surprendre plus d'un !

Nous connaissons l'autrice avant tout pour Blue Period sa saga sur un étudiant en école d'art en pleine introspection perpétuelle. Pas de surprise du coup à la voir développer des histoires autour de l'art et de la recherche de soi dans Nude Model. Pour encore mieux nous le faire comprendre, l'éditeur a fait le choix d'une jaquette - concept avec une texturisation et un grammage différent de d'habitude. Si cela fait son petit effet au premier abord, pas sûre que sa finesse et son gondolage déjà présent chez moi résiste bien au passage du temps...

Revenons à ce volume. Il se découpe en 3 histoires distinctes dont la dernière compte deux volets. Les deux premières se déroulant au lycée et la dernière dans un univers fantastique entre club d'hôtes vampirique et clinique médicale. Chaque histoire va venir gratouiller et gêner son lecteur, que ce soit avec des discours mascu bien dérangeant, un langage cru et une vision de l'art ou encore du désir simpliste. Cependant, derrière ces grands traits tracés à la va-vite on sent aussi comme des croquis de ce que l'autrice proposera en plus percutant ailleurs. 

Ainsi même si j'ai été très dérangée par la vulgarité qu'elle a voulu instiller chez chacun de ses personnages ado, comme s'ils fallait tous qu'ils soient insolents et mal élevés, j'ai su apprécier aussi la solitude et le mal être qui perçaient chez chacun, ce qui a rendu cette lecture ambigüe. Si je n'ai pas aimé la vision souvent pervertie et toxique du désir dans chacune de ses histoires, j'ai été touchée par la vulnérabilité qui se dégage peu à peu de chacun de ses héros au final pas du tout à l'aise sur le sujet. Alors oui, c'est brouillon, oui on n'a que des esquisses, mais ce sont des brouillons prometteurs à la narration ciselée et efficace, elle. 

La première histoire nous fait croiser le chemin de Niko, un lycéen qui joue les racailles avec ses amis et qui sur un pari cherche à coucher en 3 jours avec Natsume, une fille discrète qui est une artiste. Mais en se proposant de poser nu pour elle et en jouant les fiers à bras, c'est une âme bien plus sensible qu'il va mettre à jour. J'ai beaucoup aimé l'inversion progressive du rôle influent dans cette histoire et la façon dont c'est Natsume qui prend le pouvoir. En revanche, cette caricature des bandes de potes adolescents m'est sortie par les yeux. La fin est également un peu abrupte.

La deuxième histoire, bien qu'un peu plus travailler dans sa trame narrative, reprend le même cadre agressif et gênant avec ces groupes de garçons lycéens qui parlent mal des filles, du sexe et du désir. Je n'aime pas du tout cette représentation caricaturale extrême. Cependant là aussi, l'autrice va dégager au final quelque chose, un message sur ces garçons qui déblatèrent sur les filles sans comprendre ce à quoi leur regard les expose et les violences qu'elles subissent et qui pourraient leur arriver aussi. Ainsi, même si le héros de l'histoire, Yada, est détestable, au moins connaît-il au final un électrochoc qui va peut-être le transformer. 

Enfin, la dernière histoire, qui couvre la moitié du tome, est aussi sombre et dérangeante que les précédentes, avec une Tsubasa Yamaguchi qui se sert de la figure fantastique du vampire, couplée à celle typiquement japonaise de l'hôte, pour mettre un coup de projecteur sur les relations sous emprise. On pourrait croire à une belle romance touchante entre Sachi, une médecin qui a peur du sang, et Yohan, un hôte vampire, qui va lui apprendre à surmonter cela. Mais très vite, la dépendance se crée, ainsi qu'un déséquilibre toxique au profit de Yohan, qui met Sachi sous sa coupe l'air de rien. C'est beau et malaisant à la fois, dans une belle réinterprétation du mythe vampirique. Mais l'ensemble est probablement trop long pour ce qu'il veut raconter par moment, avec des ramifications peu pertinentes comme le changement de sexe et taille de Yohan en fonction du sang qu'il boit, pour un final bien plus tragique et percutant que le reste, qui lui vaut le coup. 

En bref

Recueil de nouvelles qui se veut plus sombre que ce à quoi l'autrice nous a habitué, Nude Model est surtout un recueil de brouillons, de croquis d'histoires et de thèmes. L'autrice y fait preuve de beaucoup de maladresses en brossant ses portraits même si les thématiques sont intéressantes une fois qu'on creuse; Cependant cela ne donne pas forcément envie d'y revenir car c'est excessif, vulgaire et souvent trop caricatural. Je continue à penser qu'Elle et son chat et son titre le plus abouti mais ce n'est pas elle qui a fait le scénario...

6
Nude Model
Positif

Un éditeur qui suit son autrice

La possibilité de suivre les essais d'histoires d'une autrice de saga plus longue

Des thématiques fortes sur le manque de confiance en soi, l'apprentissage du désir, les relations toxiques, les violences faites aux femmes

Negatif

Une narration brouillonne

Des personnages caricaturaux

Une définition bancale et provocatrice des garçons adolescents

Trop de vulgarité gratuite, une vision biaisée

Une première histoire à la chute abrupte

Une dernière histoire avec des longueurs inutiles

Un titre clivant

Tampopo24 Suivre Tampopo24 Toutes ses critiques (1649)
Partager :
Commentaires sur cette critique (0)
Laissez un commentaire