Critique Manga Mushishi #10

8
Mushishi

par Tampopo24 le jeu. 11 janv. 2024 Staff

Poésie fantastique dans un Japon de légendes

Je n’ai pas pu résister bien longtemps à l’appel du charme de cet ultime volume d’une série qui m’a envoûtée de bout en bout.

Je regrette certes un format un peu
épisodique. J’aurais aimé peut-être un fil rouge, peut-être croiser
d’autre mushishi et élargir ainsi cet univers. Mais en même temps, le
huis clos proposé par l’autrice avec Ginko comme seul héros qui nous
emmène d’une histoire à l’autre avait du sens et portait un grand
charme. Il rappelait un peu ces médecins itinérants, ces pharmaciens
voyageurs, que j’avais découvert dans Père & Fils. C’est un charme désuet qui me parle.

Maintenant, laissons parler l’autrice qui a des mots très justes sur son oeuvre et ce qu’elle porte comme valeur : « Exprimer
avec des mots ce souhait peut le faire paraître exagéré, mais je
voudrais croire que tous les hommes sont reliés par leurs racines. Dans
une partie de nos racines résident les récits folkloriques, le
merveilleux et les légendes. Si l’on éprouve de la nostalgie quand on
entend un conte, ou quand on voit un paysage, alors que c’est en
principe la première fois, c’est sans doute à cause de cela. Ce n’est
pas pour autant que nous pouvons nous comprendre mutuellement, mais
c’est tout de même une lumière qui nous éclaire. »

Elle résume ici toute son oeuvre et tout
ce dernier tome où les rapports des hommes et femmes croisés avec la
nature et les mushis qui viennent les parasiter est plein de nuances.
L’ultime histoire, notamment, est d’une belle complexité, rendant à la
fois hommage à la nature et à nos rapports compliqués avec celle-ci,
posant la question de nos obéissance, soumission à elle, mais aussi aux
blessures qu’elle subit à cause de nous et pour finir se faisant l’écho
de l’appel de l’autrice à une entente en bonne harmonie. Un très beau
moment.

Les autres histoires ne sont pas en reste
et sont un très beau dernier hommage à sa passion pour le folklore et
les légendes. La première histoire est particulièrement marquante à ce
sujet avec sa robe de « nymphe céleste », mais la seconde aussi avec cet
homme-camphrier. J’ai tout de même une certaine inclination pour celle
revisitant « le jour sans fin », un sujet que j’ai toujours beaucoup
apprécié, traité ici simplement et avec émotion. A chaque fois,
l’autrice se sert de ces émotions simples de la vie de tous les jours,
celles régissant nos relations sociales et plus particulièrement
familiales. Et l’air de rien, cela touche en plein coeur, que ce soit
avec un père qui a peur de perdre son fils, un homme effrayé par la
maladie surprenante qui le gagne, un homme désespérément amoureux de sa
femme ou un frère très attaché à sa soeur. Tout repose sur des
sentiments très simples et pourtant tout est fin, percutant. C’est du
grand art !

En bref

C’est sur ces sentiments de paix et de profondeur que se clôt cette visite de la nature et de l’humain à travers le prisme fantastique et folklorique du filtre choisi par Yuki Urushibara. Ce fut un merveilleux voyage, parfois tendre, parfois âpre mais toujours émouvant, avec des réflexions intenses sur la nature de nos relations avec les autres et avec nous-même. Je suis ravie d’avoir osé redonner sa chance à ce titre passé inaperçu chez moi. C’est vraiment le genre de lecture philosophique dans laquelle j’aime me perdre, réfléchir et voyager. J’espère que nous aurons d’autres titres de l’autrice car avec celui-ci Flow et Underwater, c’est carton plein chez moi !

8
Mushishi
Positif

Un merveilleux hommage au Japon d'autrefois et à ses croyances

Des histoires pleine d'émotion et de finesse

La pureté et la complexité des relations à la nature

La beauté des relations humaines dans toute leur âpreté

Des dessins enchanteurs

Negatif

Une absence de fil rouge et d'enjeu que certains regretteront

Un univers de mushishi toujours aussi mystérieux

On aurait bien aimé y rester encore...

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