Retour vers le passé : Les révoltés de l'an 2000 (1976)

 

Horreur
Long métrage espagnol
Ecrit et réalisé par Narciso Ibáñez Serrador
Avec Lewis Fiander, Prunella Ransome, Antonio Iranzo…
Titre original : ¿Quién puede matar a un niño?
Année de production : 1976

Le générique des Révoltés de l’an 2000 (titre français absurde de ¿Quién puede matar a un niño?, que l’on peut traduire par Qui peut tuer un enfant ?) est particulièrement éprouvant. Pendant plusieurs minutes, des images d’archives défilent entre l’incrustation des crédits…la libération des camps d’Auschwitz, la Guerre de Corée, le Vietnam, les guerres civiles au Nigéria. Les charniers, les corps mutilés, la famine…autant de visions déchirantes et inconfortables ponctuées de chiffres qui appuient bien comme il faut sur le fait que la fin de l’enfance est l’une des conséquences de toutes les conflits et de la folie meurtrière des adultes. Si certains pourraient trouver cette démonstration racoleuse (et cela a peut-être été le cas), elle sert en fait le propos du réalisateur espagnol Narciso Ibáñez Serrador, un téléaste qui a très peu travaillé pour le cinéma…mais ses rares travaux pour le grand écran restent marquants…

 

 

Les personnages principaux des Révoltés de l’An 2000 sont Tom et Evelyn, un couple de touristes anglophones qui viennent d’arriver au port espagnol de Benavis. Le petit village est bondé et Tom n’attend qu’une chose, rejoindre l’île éloignée d’Almanzora, plus paisible. Le ton de ces premières minutes est dans l’ensemble apaisé, jusqu’à ce que la réalité du monde rattrape le couple par l’intermédiaire d’images aperçues sur un poste de télévision, des enfants en pleurs près d’un immeuble thaïlandais en ruines. Tout au long de ce premier acte, Narciso Ibáñez Serrador (qui a également écrit le scénario en s’inspirant librement d’un roman sorti à la même période) dissémine efficacement des indices préparant à l’horreur à venir…

À peine débarqués sur Almanzora, Tom et Evelyn sont étonnés de trouver l’endroit aussi calme et aussi peu peuplé. Les adultes sont aux abonnés absents et les quelques enfants rencontrés se comportent de façon mystérieuse. La caméra suit les déambulations des amoureux dans ces rues désertes et le réalisateur prend son temps pour faire monter un suspense étouffant sous un soleil de plomb (tout le contraire de La Résidence, le précédent long métrage horrifique de Serrano qui jouait sur l’obscurité), en amenant habilement les éléments qui aboutiront à cette situation difficile à appréhender pour les protagonistes : un soir, tous les enfants de l’île sont devenus fous et se sont mis à massacrer presque tous les adultes du village…

 

 

 

L’enfant maléfique est l’une des figures régulières du cinéma d’horreur et elle trouve ici une de ses plus glaçantes expressions, aussi bien par le cadre de l’histoire que par la volonté de ne pas donner d’explication au comportement des petits tueurs (d’après ce que j’ai compris, il y en avait une dans le roman mais Serrano a décidé de ne pas l’inclure dans son film). Lorsque les vacanciers assistent au premier déchaînement de violence (une fillette toute mignonne qui bat à mort un vieillard), ils ne peuvent en croire leurs yeux et Tom sera témoin de scènes terribles d’un air hagard, comme si sa vision du monde et toutes ses convictions avaient été détruites en un instant.

Brillamment réalisé (avec des plans d’une grande puissance et des influences bien digérées), Les Révoltés de l’an 2000 se termine sur un dernier acte terriblement anxiogène qui prend aux tripes et secoue jusque dans ses dernières minutes. Une grande réussite du cinéma horrifique ibérique !

 

 

Le Doc

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