Critique Webtoon White Blood #1

La fille à la couronne d'épine

Après les éditions nazca, les éditions delcourt avec leur collection kbooks, les éditions ki-oon (toon) , la maison d'édition Michel Lafon se lance à son tour avec White Blood dans l'exploitation papier du webtoon histoire de profiter également de la vague de ces chers manhwa qui font fureur sur le net à travers le label Sikku.

C'est avec White Blood que ce label fait son entrée parmi des titres renommées tel que Solo Leveling, True Beauty ou encore Sweet Home. White Blood lui-même  est un petit mastodonte  qui fait partie des têtes d'affiches du site Naver Webtoon. Tout droit venu de Corée, Naver webtoon est le site de webtoon qui a lancé toute cette mode du manhwa en scrolling. Nous n'avons donc pas affaire à un petit joueur mais à un concurrent solide face à cet autre mastodonte qu'est Solo Leveling. Le label Sikku démarre fort , très fort avec un premier tome plutôt dense de 300 pages !

White Blood nous conte l'histoire de Hayan, une sympathique étudiante orpheline qui passe son temps entre les études et sa famille de l'orphelinat. En apparence, Hayan est une jeune femme doté d'un bon coeur dans une Corée qui est cependant assaillie par les attaques nocturnes de sinistres créatures : les vampires. Mais Hayan possède un terrible secret : elle est elle-même un vampire et plus précisément un vampire de sang-pur. 

Recueilli par le père Michael à l'âge de 10 ans, notre jeune étudiante tente tant bien que mal de mener un quotidien normal mais lorsque les attaques de vampires menés par les terribles et puissants Messagers font irruption dans sa vie, elle n'a d'autre choix que de se lancer elle-même dans la bataille, se métamorphosant en une vampire aux cheveux blancs ornée d'une couronne d'épine. Elle devient alors une guerrière bien décidée à mettre fin aux exactions de ses congénères sur d'innocents humains.

Ce premier volume de White Blood est tout simplement généreux et entrainant. Il est porté par une intrigue très bien ficelée qui combine des personnages attachants , des séquences d'émotions et des combats bien sauvages. Pour un nouveau titre sur les vampires, White Blood se démarque par sa puissance narrative et par la qualité de ses personnages à commencer par une héroïne d'apparence frêle qui se métamorphose en véritable guerrière face à l'oppression des vampires comme le montre dés le départ un super préambule avec une Hayan sur le point d'en découdre avec toute une armée de suceurs de sangs.  

La dessinatrice coréenne Lim Lina prend le temps de dérouler l'intrigue et l'univers de White Blood entre le quotidien "humain" de sa chère héroïne qui tente de dissimuler sa véritable nature parmi les mortels alors que la crante des vampires devient plus importante au fur et à mesure des attaques tandis qu'elle doit elle-même se battre face à ses violents congénères. Gravitant autour de son héroïne , Lim Lina nous présente une galerie de personnages bien écrits tel que le mystérieux inspecteur chasseur de vampires , le redoutable et stoïque père Michael du côté des humains tandis que chez les vampires, quelques antagonistes remarquables font aussi leur apparition comme le paranoiaque Byeongsu, la brute devenue un vampire  ou encore l'un des dangereux Messagers, un groupe de puissants vampires implantés en Corée. Cette galerie de personnages donne du cœur à ce titre et offre un ton parfaitement équilibré à ce premier volume qui ne s'attarde pas uniquement sur son héroïne centrale. Les autres personnages sont donc également bien mis en valeurs comme l'impressionnant père Michael, un prêtre scarifié au douloureux passé. 

De même, on soulignera la cohérence de cet univers avec ce rapport de menace et de force entourant les humains et les vampires comme en témoigne les manifestations étudiantes contre les attaques meurtrières des créatures ce qui renforce le déchirement qu'éprouve notre héroine partagé entre son humanité et sa nature de vampire impitoyable qu'elle laisse éclater uniquement face à ses congénères. J'ai aussitôt pensé à la double nature de Buffy dans la fameuse série, lycéenne le jour, tueuse de vampire la nuit ! D'ailleurs, une superbe page avec Hayan en mode vampire et affublé de l'uniforme de l'école fait vraiment penser à la série teenage des années 90 tandis que sa coiffure tout en blancheur donne un petit côté dark fantasy façon Devil May Cry. Je ne serais pas surpris que Lim Lina se soit inspiré de quelques éléments très pop culture du vampire, quelques références qui donnent énormément d'énergie à ce titre fantastique. 

Pour leur première adaptation papier d'un webtoon, le label Sikku a réalisé un excellent travail. Au niveau du format, nous nous situons dans le meme style que la plupart des webtoons papiers publiés aujourd'hui. Le papier de qualité est légèrement plus fin que le papier glacé proposé par le label Kbooks mais le contenu n'en reste pas moins d'excellente facture avec un bon rendu couleur et une bonne adaptation du scrolling. Lim Lina démontre ainsi son aisance à découper l'action sous toutes ses formes que ce soit au niveau des combats vampire vs vampire ou humain vs vampire. La colorisation numérique est impeccable avec quelques passages plutôt originaux comme la vision subjective du vampire souffrant d'un complexe d'infériorité, vision qui sous filtre rouge et expressions abusives vient déformer sa vision du monde.  Le chara-design est également très bon porté par un style "beau gosse" assez répandue dans le webtoon mais qui n'en demeure pas moins efficace.

On pardonnera quelques moments un peu plus WTF comme la confrontation du prêtre qui rappelle le côté déjanté d'un film de Takashi Miike ce qui n'empêche pas de se régaler face au spectacle. 

Mention spéciale enfin à cette couronne d'épine , une superbe trouvaille, qui fait passer Hayan pour une guerrière martyr/repentie des plus badass.