Critique Manga Journal de ma solitude

7
Journal de ma solitude

par Auray le mer. 9 sept. 2020 Staff

Le monde tourne autour de toi !

Pika Graphic est une très belle collection mettant en avant les auteurs avant tout par son grand format. Le précédent journal intime de Kabi Nagata était paru sous cette forme sous le titre, « Solitude d'un autre genre », mais vous en aurez pas forcément besoin pour apprécier cet épais second volume. On a toujours la même amie invitée à la porte, soit, la solitude.

Au début, il faut rentrer dans ce style si particulier où l'auteur se confie à soi-même, tout en le partageant au monde entier sur le site internet Pixiv. Contrairement à ce que fait penser le bandeau, on ne parle pas tant que ça de ses relations lesbiennes futures, mais plutôt de la dépression. Plus exactement, on le découvre au fur et à mesure de ses introspections en même temps qu'elle, à travers ses échecs familiaux ou amicaux. Et, il faut le dire, c'est difficile à lire !

Tout d'abord, parce qu'il n'y a pas de filtre, tout est dit sans pudeur, il faut voir l'épisode où elle est d'atteinte d'alcoolisme, et qu'elle commence à s'uriner dessus au lit à bientôt trente ans. Il est vrai que cela permet de partager son expérience d'une manière transparente, mais ici, on perd aussi le respect pour soi-même. Ce n'est pas drôle du tout, on rit ailleurs un peu, certes, mais on est souvent triste lors de cette lecture. Triste, qu'elle ne puisse jouir de l'amour, de l'amitié, ou de la protection de ses parents sans avoir des idées noires.

Du coup, on est soulagé quand ça s'arrête, ou que du moins, le destin de la jeune japonaise est pris en main lors d'une hospitalisation. Sa conclusion est d'ailleurs frappante, elle prend conscience du mal fait aux autres et de sa maladie, sans pour autant vraiment évoluer par la suite, ou alors dans un possible troisième tome ?

Sinon, un des points positifs, c'est quand même ses histoires sur son entrée dans le monde de l'édition par exemple, l'accueil de son précédent livre dans le coccon familial et de celui-ci, car parfois, il se passe plusieurs mois entre deux chapitres. Rarement, elle nous parle aussi avec passion de ses lectures, bien que trop rare. Car, quand on déprime vraiment, on ne fait rien. Ce qui ne l'empêche pas de parler donc d'Unico la petite licorne du grand Tezuka. Mais encore une fois, le sentiment d'insatisfaction de l'artiste n'est jamais bien loin, avec le manque de confiance en soi, accompagné du non-sens de se sentir inférieur aux autres. Bref, la dépression est une vraie maladie qui vous empêche d'être heureux, en plus d'une pression sociétale typiquement japonaise. Kabi Nagata ne fait pas exception.

Au niveau des dessins, on est bien entendu dans une caricature dans le pur style manga, on est surpris d'ailleurs par le style graphique premier lors de notre lecture de la mélancolie de Chika, qui rappelle fortement la thématique phare de notre épais bouquin. Le talent est bien présent, on admire des expressions poussées à son paroxysme dans le pur style manga, mis en valeur par le grand format des Pika graphic.

La dépression, c'est pour toute la vie, et on se sent démunie face aux diverses expériences sociales de Kabi Nagata. Ce livre est nécessaire pour mettre en avant une pathologie qui n'est pas mise sous les projecteurs du grand public, pourtant, il est dommage que cela devienne un problème inhérent aux réseaux sociaux, c'est-à-dire que le tout est trop transparent jusqu'à la gêne, avec sa spécificité ici, que le tout est exprimé avec beaucoup trop de tristesse. Il aurait fallu qu'elle lise mon cancer couillon de Kazuyoshi Takeda dans la même collection, pour prendre exemple de ce qui peut se faire de mieux : faire rire tout en donnant des informations diverses malgré la situation désastreuse, et donner des pistes de recherche. Son attirance pour les femmes reste un sujet positif par contre, et sa petite aventure est très attendrissante. On espère vraiment qu'elle trouvera un jour l'amour, et, que ça lui donnera une partie du bonheur dont elle touche si peu. Pourtant, il n'est pas sûr qu'elle puisse le reconnaître quand il se présentera devant, tant elle subit sa maladie... la solitude est à présent bien trop ancrée, et commence à laisser des marques indélébiles, comme les tentatives de suicide. Alors, prend plus soin de toi Kabi Nagata, et arrête de lire les avis sur Twitter, ou d'attendre les autres pour exister et t'épanouir !

En bref

«Chère Kabi Nagata, c'est Kabi Nagata»

7
Journal de ma solitude
Positif

Les dessins cartoons

Le format luxueux de Pika Graphic

Les histoires sur l'accueil du public de son précédent livre, « Solitude d'un autre genre »

On parle d'Unico la petite licorne de Tezuka

Negatif

C'est un journal intime, mais il est tout de même difficile de rentrer dans un style trop centré sur soi-même et l'auto-apitoiement

Déprimant pour le coup, une lecture qui rend triste et qui manque de recul sur la maladie

On ne diagnostique pas tout de suite cette dépression, pourtant bien présente dès le début, dommage, car le début est du coup brouillon

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