Critique Manga Animal Human #1

La Grande Bouffe

Halloween se rapproche à grand pas et pour fêter ça, les éditions Mangetsu proposent une opération halloweenesque mettant en valeur leur catalogue horreur, un genre dont l'éditeur est plutôt friand comme le prouve des titres tels que Smile, Shigahime et surtout la collection Junji Ito.Un nouveau venu débarque dans leur sélection horreur en ce début du mois d'octobre 2025. Animal Human , premier manga de Takuya Okada. Un titre horrifique dans lequel l'humain devient un met de choix pour des animaux anthropomorphiques. Bon appétit !

Un père et sa fille viennent d'avoir un accident de voiture, par chance, ils sont sauvés et recueillis par d'étranges êtres anthropomorphiques. D'abord aimable et chaleureux, ces animaux humanoïdes finissent par dévoiler leur véritable objectif : ils élèvent des humains dans une ferme comme du bétail. Le père décidera de faire tout son possible pour sauver sa fille et quitter cet endroit maudit où les animaux ont pris la place des humains.

Voilà un titre qui ferait plaisir à l'activiste de la cause animale , Solveig Halloin. Animal Human joue sur une inversion cauchemardesque des rôles à travers des animaux anthropomorphiques monstrueux qui chassent, élèvent, et cuisinent des humains. Un programme peu ragoutant et féroce qui, forcément, nous impose un reflet monstrueux de notre propre rapport à la viande avec tout de même un degrés horrifique assez prononcé.

Ainsi Takuya Okada, dont c'est la première publication en France, ne prend pas de gants et va choquer son lecteur avec des planches saisissantes : des humains parqués dans des enclos tel du bétail, des séances de chasses effroyables, des corps démembrés sur une jolie table de banquet, des animaux anthropomorphes monstrueux et redoutables...Voilà un programme peu ragoutant. Bien évidemment, faut-il le préciser ? Animal Human n'est pas un titre à mettre entre toutes les humains. Certains planches sont assez dures à regarder ( cf la scène de viol) et on pourra être touché par le père et sa fille. Le manga est tout simplement impitoyable.

Impitoyable mais pas bête non plus. Le manga apporte sans nul doute une critique horrifié à notre consommation. Animal Human est un miroir de notre société, parfois peu subtil comme en témoigne le moment choc du viol qui est surtout là pour exacerber l'horreur de ce village.

Mais cette première œuvre va plus loin que la simple dimension critique de notre rapport à la consommation animale, elle questionne notre avidité à vouloir déguster un met gouteux et à quel prix les élites seraient prêtes à trouver le mets parfait. Peu à peu, le titre glisse vers une critique beaucoup plus féroce et globale qui ne prend pas forcément parti du camp anthropomorphique ou humain. Un choix qui élargit l'intrigue pour la suite de la série. 

Pour illustrer son propos, le mangaka maitrise un style anthropormophique assez réussi. Tour à tour, nous découvrons un cerf, maitre de la ferme, noble et raffiné qui respecte la vie, un sanglier renifleur terrifiant, un ours brutal et une effroyable mère pondeuse... Le chara-design est saisissant. L'ambiance du manga se rapproche du film indépendant Les animaux anonymes qui jouent également sur cette inversion de rôles. De plus, ce style anthropomorphique est traité de manière expressive ce qui ajoute une dose de monstruosité et de cruauté à ces créatures. A contrario, le dessin des humains possède quelques défauts de proportions en terme de tailles mais cela contribue aussi à leur donner une allure plus fragile que les animaux.

Cette Ferme des animaux cauchemardesque est un titre à lire pour tous les amateurs d'horreurs. Ce premier tome d'Animal Human est un huit-clos monstrueux qui joue en permanence sur cet effet miroir glacial. La série affiche une direction plus ambitieuse en fin de volume. On espère qu'elle ne perdra pas de sa force horrifique par la suite en en faisant un peu trop sur cette dimension critique. 

Dans tous les cas, ce titre est à lire si vous avez le cœur et l'estomac bien accroché.