Critique Manga Le Déserteur #1
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par MassLunar le sam. 31 août 2024 Staff
Les origines de Junji Ito - genèse d'une horreur toujours hantée
Déjà trois ans que les éditions Mangetsu ( label manga de Bragelonne) ont décidé de rééditer les œuvres du patrimoine horrifique de Junji Ito à commencer l'un de ses titres-phares, Tomie. La boucle des origines de ce grand maitre de l'horreur est ici bouclée avec la parution de ce recueil Le déserteur qui comprend douze premières nouvelles dessinées entre 1987 et 1990. Et bien que les premiers traits de ces tout premiers contes horrifiques soient plus simples et moins riches que les œuvres ultérieures du mangaka , nul doute que l'horreur dévoilée ici est toujours aussi impactante et diablement efficace !
Dès la première nouvelle horrifique qui nous convie dans un curieux ( et passablement rebutant) diner entre un patron carnassier et sa timide secrétaire à celle qui donne son titre à ce quatorzième tome (déjà!) de la collection, le lecteur est continuellement happé par l'imaginaire horrifique et passionnant de ce mangaka, lui-même nourri à l'horreur auprès de maitres comme Kazuo Umezu. A cette époque , Ito-San était encore coincé dans la "voie de la raison" avec son métier de prothésiste dentaire... Le dessin était alors un à côté, le mangaka possédait la passion mais sa technique n'était pas aussi affinée bien naturellement. Il faudra attendre le succès de Tomie. Mais bien que son dessin soit plus simple avec ces visages ronds et des décors plus vides, la narration est dans l'ensemble diablement maitrisée avec l'irruption soudaines de planches horrifiques hallucinantes où votre regard se noie jusqu'à vous rendre fou ...
C'est le cas notamment de la nouvelle De longs cheveux sur le toits qui témoigne déjà de l'amour précoce de Mr Ito pour les chevelures endiablés du mangaka, de Le village des sirènes, plus dark fantasy, plus horreur lovecraftienne avec l'apparition de quelques démons cyclopéens, on notera également le soin claustrophobique apporté à certains passages comme le génialissime L'insoutenable Labyrinthe ou le huit-clos à la fois "temporel" et physique du Déserteur dans lequel les aplats de ténèbres dissimulent des secrets repropulsant l'intrigue.
Avec Le déserteur , Junji Ito fascine déjà avec son épatant talent de narrateur qui explore certains travers de la société comme le terrible pouvoir des sectes, la perte de l'identité, le trauma du harcèlement perçu à travers le point de vue du bourreau comme en témoigne la nouvelle cruelle et glaciale La Sadique ou encore la folie patriarcal dans Dans le coeur d'un père. Le mangaka dépeint un horreur viscéral, d'autant plus remuant puisque très humain, explorant les abymes du cœur.
A cela, son sens du découpage est d'autant plus symbolique par le biais de cases qui jonglent entre le body-horror comme Un endroit ou dormir et le malaise suscité par des expressions faciales paralysantes comme les visages des cultistes qui viennent directement vous juger du regard.
L'un des grands maitres du manga horrifique prouve avec ce recueil son talent précoce : celui de combiner le malaise et la peur, le gore et l'émotion. Tout au plus, pourra t-on relever en guise d'imperfections , des nouvelles dont la conclusion n'est pas toujours aboutie et bien sûr un dessin pas encore totalement aiguisée mais qui donne tout de même lieu à des planches déjà mémorables, voire traumatisantes.
En bref
Retour en arrière réussie pour ce quatorzième tome des oeuvres de Junji Ito dans cette belle collection concoctée par Mangestu qui compile ici les premières nouvelles du maitre de l'horreur. C'est un tour d'horizon malaisant et horrifique à souhait , une douce poigne de fer qui vous confronte à une peur plus viscérale à travers des nouvelles mémorables , percutantes, malgré (ou grâce à) un style encore pure et primal.
Positif
Des premières nouvelles qui confirment déjà le talent horrifique d'un futur grand maitre de l'horreur
Une narration bien maitrisée assortie de quelques planches glaciales
De l'horreur qui s'entremêle aux travers de la société ( sectes, harcèlement, cupidité...)
Negatif
Des conclusions un peu abruptes
Un style graphique qui forcément se cherchait encore.
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Commentaires sur cette critique (1)
HalatiCourse
So great! Fun Games
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