Critique Manga Arion #1

9
Arion

par Tampopo24 le lun. 28 août 2023 Staff

Le Rahan du manga

Avec mon penchant pour la mythologie et les titres rétro, Arion était
définitivement une lecture faite pour moi et une sortie que j’attendais
avec impatience. J’y avais mis beaucoup d’attente, l’éditeur aussi je
crois, quand je vois le travail éditorial qu’il y a eu derrière. Je suis donc ravie que la lecture ne m’ait pas déçue, bien au contraire ! 

Sorte de Rahan du manga, Arion entreprend de présenter un versant bien sombre de la mythologie grecque,
à une époque, début des années 80, où au Japon on avait plutôt tendance
à en faire quelque chose de rond et presque gentillet. Mais son auteur,
YAS, issu de l’animation et passionné des récits de Tezuka et des shojos dramatiques des années 70, a décidé de lui donner une autre couleur, pour notre plus grand plaisir.

La première chose qui frappe, c’est la qualité graphico-narrative de ce récit. Yoshikazu Yasuhiko y a mis toute sa science de producteur de storyboard pour l’animation et ses influences tezukiennes et shojos pour accoucher d’une narration au découpage original et percutant, que bien des auteurs de seinen et shonen actuel pourraient prendre en exemple. C’est dynamique, riche et poétique à la fois, cela répond à merveille à la dimension mythologique du récit. De plus, son trait très sombre, avec des noirs très profonds et un travail au pinceau magnifique,
nous immerge dans un univers tragique saisissant et happant, qu’on a
peu vu ailleurs à l’époque et même encore maintenant. J’y ai vu un prototype de la dark fantasy à la japonaise.

L’histoire elle s’appuie sur un épisode de la mythologie grecque que l’auteur a revisité pour mieux accrocher le lecteur. Arion n’est donc plus un cheval mais un jeune garçon, le fils de Poséidon et Déméter même, et enlevé par Hadès, il sera façonné pour en faire l’objet de la vengeance de ce dernier face à son frère cadet : Zeus. Amatrice de mythologie, j’ai beaucoup aimé découvrir une histoire originale mais avec des personnages connus et des dynamiques connues entre eux, le tout sous le regard très japonais de l’auteur, qui teinte légèrement différemment les représentations de certains personnages.
Elle est loin la figure d’un Zeus tout puissant et imposant dans ce
portrait d’un être méprisable et ridicule qu’il en fait. Elle est loin
la guerrière fière et farouche dans cette Athéna qui a peur de montrer
son corps nu. Il est loin le terrifiant dieu de la guerre dans cet Arès
un peu falot. YAS reprend ces figures mais les transforme pour le bien
de son histoire.

Cette dernière est très dynamique à suivre dès le premier riche tome de cette intégrale qui en comptera 3, au lieu de 5 en japonais. Les scènes s’enchaînent. On passe des tendres moments de l’enfance à la brutalité de l’adolescence. On passe de l’amour maternel, à une guerre dans laquelle on est jeté comme instrument perturbateur. On passe de la naïveté à la confrontation pure et dure aux vicissitudes de l’âge adulte. Arion est notre porte-étendard, celui qui nous fera pénétrer cet univers et ses turpitudes, l’instrument de sa famille turbulente également. A travers lui, nous aurons drame, action, amour, vengeance et prophétie. Pour autant, ce n’est pas encore un personnage très bien défini pour le moment. Il est encore en construction et modelable
grâce aux nombreuses rencontres qu’il fera et a déjà commencé à faire.
Nous, nous ne nous ennuyons pas un instant, l’auteur jouant sur de multiples dynamiques narratives allant du drame, à l’épique, en passant par la tendresse et l’humour, pour nous conter ce voyage initiatique familial. Ce premier tome n’est qu’une vaste amorce et que j’ai hâte de poursuivre avec le deuxième tome arrivant déjà en septembre.

J’avais suivi cette belle aventure éditoriale sur les réseaux sociaux, auprès d’un éditeur plein d’enthousiasme. Leur enthousiasme a su me toucher dans ce superbe objet un peu hors norme. Une saga au format XL (comme l’édition colossale de L’Attaque des Titans), un papier épais de qualité rendant à merveille la belle impression profonde des noirs de YAS, de belles pages couleur aussi sur un beau papier, des bonus intéressants entre interview et petits mots sur les personnages. Vraiment, je vois aucune fausse note et je suis ravie que le titre ait été sorti par Naban, un éditeur qui soigne ses lecteurs. Après Destination Terra… quel bonheur de découvrir un autre titre patrimonial dans d’aussi bonnes conditions !

En bref

Fable mythologique à l’ancienne, Arion nous plonge dans une version sombre et tragique de la mythologie, sous le trait rétro saisissant d’un Yoshikazu Yasuhiko qui a su mettre à profit son expérience dans l’animation avec un découpage dynamique et sombrement poétique excellent ! Je me suis régalée avec cette revisite de l’univers des Dieux dans une ambiance rétro aux faux airs de Rahan, pour nous lecteurs occidentaux. Entre bel objet et belle histoire, l’éditeur fait à nouveau un sans faute ! Rendez-vous dans quelques semaines pour la suite.

9
Arion
Positif

Un objet de grande qualité

Une narration graphique incroyable

Des dessins sombres à souhait

Une revisite noire et sans concession de la mythologie

Un épisode inédit et riche

Negatif

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