Retour vers le passé : La Dernière Maison sur la Gauche (1972)
Horreur
Long métrage américain
Ecrit et réalisé par Wes Craven
Avec David Hess, Lucy Grantham, Sandra Cassel, Marc Sheffler…
Titre original : The Last House on the Left
Année de production : 1972
« Dans un sens, ce sont les films d’un jeune homme qui avait en lui plus de rage qu’il ne le pensait ». Wes Craven a souvent décrit ses deux premiers longs métrages, La Dernière Maison sur la Gauche et La Colline a des Yeux, de cette façon. Le futur créateur de Freddy Krueger a fait ses débuts dans le monde du cinéma dans le domaine de la sexploitation, notamment aux côtés de son compère Sean S. Cunningham (qui a ensuite créé un autre tueur emblématique du cinéma d’horreur, Jason Voorhees). Entre deux montages de films pornos, Wes Craven a aidé Cunningham sur Together, un faux documentaire d’éducation sexuelle, qui avait plutôt bien marché. Ils ont alors été approché par un financier qui leur a proposé environ 90.000 dollars pour tourner un film d’horreur.
Wes Craven a saisi cette chance pour passer pour la première fois derrière la caméra. Son but était de montrer la violence, de façon brute et réaliste, sans la glorifier car pour lui les spectateurs de l’époque était en quelque sorte désensibilisés par la violence « glamour » des productions hollywoodiennes alors que les horreurs de la guerre du Vietnam s’étalaient dans la presse et les journaux télévisés. Craven s’est inspiré de La Source d’Ingmar Bergman (qui avait tiré son histoire d’une ballade médiévale suédoise) pour décrire le calvaire de deux jeunes femmes persécutées et torturées à mort par des brutes dégénérées.
Wes Craven avait d’ailleurs l’intention de mettre en scène un film encore plus graphique, un véritable porno horrifique, avant de changer d’avis sur l’aspect sexuel, ici suggéré. Il joue d’abord sur un certain décalage, avec un début naïf, presque « flower power », puis travaille l’atmosphère pour la plonger dans l’horreur quand Mari et son amie Phyllis tombent dans les griffes du groupe mené par le cinglé Krug (joué par l’inquiétant David Hess) alors qu’elles cherchaient un peu d’herbe avant de se rendre à un concert.
La Dernière Maison sur la Gauche possède tous les défauts, les maladresses que peuvent avoir un premier film. La photographie granuleuse est assez laide, la direction des acteurs souvent approximative, certains moments font remplissage (les vues sur les paysages s’éternisent un peu trop), la musique qui cherchait également un effet décalé avec ce qui se passe à l’écran a très mal vieillie et le scénario se perd dans des sous-intrigues inutiles (la palme va aux scènes supposées comiques…et plus gênantes qu’autre chose…avec les deux flics ploucs et incompétents).
S’il ne fait pas mouche à tous les coups, Wes Craven sait tout de même créer un malaise palpable tout au long de l’humiliation et la lente mise à mort des adolescentes. Les tueurs se retrouvent ensuite par hasard à demander l’hospitalité pour une nuit aux parents de Mari. Lorsque ceux-ci, déjà inquiets de la disparition de leur fille, découvrent la vérité, le vernis de la civilisation s’effrite pour laisser la place à la barbarie de la vengeance (et ça fait mal…comme lorsque la maman castre l’un des criminels à coup de dents).
Wes Craven inaugurait là l’un des thèmes de son cinéma en opposant deux familles qui se répondent dans une sorte de miroir déformant, comme dans La Colline a des yeux cinq ans plus tard. Car si La Dernière Maison sur la Gauche a eu son petit succès à l’époque, la réputation du film a fait que Craven et Cunningham ont eu du mal à faire aboutir leurs projets loin du cinéma d’horreur car ils ne voulaient pas être catalogués. Wes Craven a même du réaliser un porno (The Fireworks Woman) pour faire rentrer de l’argent avant de retourner finalement (et pour de bon) à l’horreur avec la famille cannibale de La Colline a des yeux.
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