Retour vers le passé : Cronos (1993)

 

REALISATEUR & SCENARISTE

Guillermo del Toro

DISTRIBUTION

Federico Luppi, Ron Perlman, Claudio Brook, Tamara Shanath…

INFOS

Long métrage mexicain
Genre : horreur
Année de production : 1993

Cronos n’est pas seulement une étrange et émouvante relecture du mythe du vampire par le biais de l’alchimie, c’est aussi un film qui établissait les fondations du cinéma de Guillermo del Toro, la première représentation cinématographique de son amour des monstres, des obsessions et des thèmes qui allaient nourrir son oeuvre.

Le futur auteur de L’Echine du Diable et Hellboy avait 29 ans lorsqu’il se lança dans la réalisation de son tout premier long métrage. Avant cela, Guillermo del Toro dirigeait sa propre société spécialisée dans les effets spéciaux et le maquillage (il a étudié la discipline après du maître Dick “L’Exorciste” Smith) et travaillait pour la télévision (principalement sur la série La Hora Marcada, que l’on peut comparer à une “Quatrième Dimension”mexicaine), tout en se faisant la main sur des courts-métrages.

Pour pouvoir réaliser Cronos, Guillermo del Toro s’est endetté et a avoué par la suite n’avoir jamais revu son argent. Mais la réputation du film, tourné pour 2 millions de dollars, lui a permis de se faire repérer par des producteurs américains et si cette première expérience ne s’est pas très bien passée (Mimic en 1997), sa carrière était définitivement lancée, entre le Mexique (le magnifique L’Echine du Diable, un de mes préférés dans sa filmographie; Le Labyrinthe de Pan) et les Etats-Unis (Blade IIHellboy…).
Un tournage compliqué peut aussi créér des liens forts et Cronos marquait la première collaboration de Guillermo del Toro avec deux comédiens qui allaient devenir des figures régulières de son cinéma, l’argentin Federico Luppi (L’Echine du DiableLe Labyrinthe de Pan) et l’américain Ron Perlman (Blade IIHellboy I & II, Pacific Rim).

 

 

 

Federico Luppi incarne Jesus Gris, un antiquaire bienveillant qui s’occupe de sa petite-fille orpheline qu’il adore par dessus tout. Cette histoire familiale n’est pas explorée mais on devine que ce qui s’est passé a profondément marqué la jeune Aurora qui ne prononce plus un mot depuis la perte de ses parents. Un jour, Jesus découvre par hasard dans le socle d’une statue d’ange un étrange objet, une sorte de scarabée en or. Le tenant dans la paume de sa main, le vieil homme déclenche un mécanisme, un mouvement d’horlogerie (les rouages, voilà un visuel qui revient régulièrement dans les histoires de Guillermo del Toro) qui déploie des appendices qui pénètrent dans la peau de Jesus Gris et le contaminent avec quelque chose d’horrible.

Sous l’effet du “dispositif Cronos” (le nom de cet artefact créé par un alchimiste du XVIème siècle), Jesus Gris sent une transformation s’opérer en lui, un rajeunissement qui se transforme en dépendance, une dépendance qui se transforme en soif de sang. L’interprétation de Luppi est excellente et il restitue de façon assez fascinante les changements que subit son personnage. Del Toro dose habilement drame et horreur et donne un beau rôle à la petite Tamara Shamath, qui joue Aurora, l’observatrice silencieuse de la descente de Jesus Gris vers un autre état d’existence, sa boussole morale, l’innocence qui lui permet de se battre pour conserver sa propre humanité.

 

 

 

Jesus Gris doit aussi faire face à De La Guardia, un industriel condamné par la maladie (et un véritable vampire aux yeux de Guillermo del Toro) qui veut à tout prix retrouver le “dispositif Cronos” et qui envoie sur sa trace son taré de neveu, le psychotique Angel. Ron Perlman est absolument savoureux dans le rôle de cet américain expatrié qui déteste sa situation au Mexique et qui peut se révéler aussi amusant (il y a quelques petites touches d’humour noir qui fonctionnent bien) qu’effrayant (notamment dans l’intense confrontation finale).

Oui, Guillermo del Toro sait passer de l’horreur au drame et il le prouve encore une fois dans les derniers instants de Cronos. Le seul mot prononcé par la petite Aurora évite l’irréparable…et ce moment poignant conduit à un bouleversant dernier plan, au symbolisme prononcé, magnifié par la très belle photographie de Guillermo Navarro, qui a retravaillé par la suite avec del Toro sur cinq autres longs métrages…

 

Le Doc

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