TRADUCTION ET ONOMATOPÉE

Minetarô Mochizuki - Maiwai, éditions Pika

A l'écoute d'un entretien de l'ami Nikolavitch pour l'émission Tumatxa animée par Photonik, il est question de traduction et d'adaptation entre autres choses et par ricochet, je me suis intéressé à la (non)traduction/adaptation des onomatopées dans les mangas.

Une problématique épineuse s'il en est pour tout éditeur de manga qui publie des œuvres en provenance du Japon par exemple à destination du lectorat français. En effet, les caractères japonais utilisés pour les onomatopées ne sont pas compréhensibles en l'état. La question se pose alors de leur (non)traduction/adaptation sachant que les onomatopées sont considérées à juste titre comme faisant partie intégrante du dessin d'une planche, et que leur adaptation entraîne des retouches d'une partie de l'aspect graphique de la bande dessinée. Un travail dont l'évolution au fil des ans peut se définir de la façon suivante selon BLACK studio, qui s'occupe de traduction et de lettrage pour divers éditeurs de mangas:

Au démarrage de l’édition du manga en France, les éditeurs ont pris le parti de remplacer toutes les onomatopées japonaises pour toucher le public plus facilement. Personne ne connaissait le manga et c’était un choix plutôt évident. Au fur et à mesure des années, le public a mûri et a fini par demander des mangas plus fidèles, ce qui impliquait, entre autres, de garder le graphisme des onomatopées.
Donc, garder une onomatopée japonaise sur la planche relève de la politique éditoriale de l’éditeur français.[...]
Désormais, il est convenu depuis longtemps que l’onomatopée est un dessin en soi qui appartient à l’œuvre. Dans les exemples cités, on le voit bien, c’est très graphique et cela prend part à la narration globale du manga.

On décèle dès lors plusieurs pratiques dans la production manga en France qui témoignent de différents choix effectués en fonction des éditeurs. Soit la traduction et le remplacement d'une onomatopée japonaise par un équivalent français, soit la conservation de l'onomatopée d'origine à laquelle l'éditeur peut dans certains cas accoler une traduction française sur la planche.

Kazuo Umezu - La maison aux insectes, éditions Le lézard noir

Takehiko Inoue - Real, éditions Kana

[...]Le choix de remplacer toutes les onomatopées est un choix difficile, car, pour le lettreur, c’est un travail beaucoup plus laborieux. Celui-ci devra retoucher les planches et redessiner certaines parties des cases ! En cela, on « abîme » un peu l’œuvre.

Pour rester encore plus fidèle de l’œuvre, la solution du « sous-titrage » a été trouvée et appliquée. Elle consiste globalement à mettre la traduction de l’onomatopée à côté de cette dernière. Ainsi, on garde le style graphique, mais on peut lire la traduction du japonais sans effort.
Dans le sous-titrage, il y a différentes gammes d’implication.[...]

Dans le cas qui m'intéresse aujourd'hui, le choix mis en oeuvre par l'éditeur est de traduire et d'adapter autant que possible en français les onomatopées mais avec une différence de taille dans l'approche puisque l'auteur du manga lui-même redessine ses propres onomatopées pour la version française. Il s'agit d'Eldo Yoshimizu dont le manga Ryuko sera publié à l'automne par Le lézard noir, dont l'éditeur Stéphane Duval s'est récemment confié sur son métier lors d'un entretien accordé à Xavier Guibert.

Eldo Shimizu - Ryuko, éditions Le lézard noir

Eldo Shimizu partage quelques extraits du travail en cours d'adaptation des onomatopées de Ryuko :

Publiée le 08.07.2016 06:57:00