Critique Distopiary 1

Chronique des deux premiers tomes

Terminée en 5 volumes, les éditions Pika nous présentent leur toute nouvelle trouvaille comme un shonen dark fantasy façon RPG dans lequel les lecteurs seront immergés dans un monde numérique pris dans le sombre engrenage d’une lutte du bien contre le mal. Fruit d'une collaboration fructueuse, on découvre deux artistes pour la première fois dans nos contrées avec au scénario Fumitaka Senga et Tellmin’ aux graphismes signant leur toute première œuvre. Une série courte qui sur papier possède tout pour attiser la curiosité des fans du genre. Va-t-elle faire souffler un petit vent frais et tenir sa promesse de nous faire passer un agréable moment de lecture?

" Que le sort des armes vous soit favorable... car vous êtes à la fois les plus puissants et les pires héros ! »

Un héros n'est rien sans ses compagnons...
Combattant, mage onirique, cuisinier, pilote, alchimiste, fruitier, mage nasal…
Dans cet univers, les classes sont déterminées dès la naissance. Celle d’exterminateur comporte les plus puissants et les pires héros.
L’heure est venue pour ces exterminateurs de partir en expédition afin de rassembler des “compagnons” qui leur permettront d’abattre le 23e roi du Mal…

" Un premier tome ne reposant pratiquement que sur un gros twist scénaristique assez bluffant réussissant définitivement à éveiller l'intérêt des lecteurs"

Le concept de base du titre se révèle très sympa à savoir celui de donner l'impression aux lecteurs de se retrouver dans un jeu vidéo et d’en observer le fonctionnement. On retrouve ainsi quelques clins d'œil au RPG notamment dans la mise en scènes des évènements ou encore dans certaines idées comme celle des castes déterminant le rôle de chacun à sa naissance mais surtout le tout est bien dosé permettant à la série de ne pas verser dans le too much.

Très vite, la quête principale est définie et on peut dire que ce n’est pas bien original de ce côté-là puisqu'il s'agit purement et simplement d'une opposition entre le bien et le mal ; l’exterminateur doit rassembler des compagnons afin de combattre le 23ème roi du mal. Par contre,  l'auteur parvient tout de même à titiller notre curiosité en dévoilant très vite un concept de l’héroïsme contradictoire et innovant. Au départ, on éprouve malgré tout quelques difficultés à comprendre où nous emmène exactement ce dernier jusqu'à ce que la réponse se dévoile sous nos yeux ébahis. C'est un pari assez osé puisque la lecture se révèle presque ennuyeuse, avec des personnages assez plats pour ne pas dire clichés, et même assez frustrante par moment puisqu’on a l'impression d'être mis un peu à l'écart des événements comme dans la soi-disante première scène d'action où on comprend qu'un drame s'est produit mais où aucune explication n'est réellement donnée.

Même ressenti lors de l'entrée en scène d'un nouveau personnage qu'on sent important mais dont on ne comprendra le rôle que bien plus tard. On se retrouve donc clairement désarçonné durant les trois quart de ce premier tome sauf que le dernier quart restant va complètement nous sortir de notre torpeur. C’est donc lors d’une véritable scène d’action que toute la lumière sera enfin faite sur le rôle d’un exterminateur, la responsabilité qui lui incombe mais surtout l'immense injustice à laquelle il est obligé de se confronter encore et encore. On ressort de ce passage scotché par les événements qui viennent de se dérouler surtout que notre héros qui semblait apathique va hurler toute sa colère et son désespoir condamné injustement par la société à vivre dans le tourment. On peut alors se demander légitimement si ce gros retournement de situation justifie l’ennui ressenti par la lecture jusqu’alors et bien la réponse est un grand oui pour ma part car on ne s’y attendait absolument pas ! L'auteur pose ainsi les bases d'une dystopie surprenante, injuste et cruelle dans laquelle même les héros en viennent à se détester. L’idée d’un monde totalement dépourvu de la noblesse d’un acte héroïque est tout simplement fascinante !

Sur quelques pages, l'intrigue va alors connaitre une avancée significative puisqu'on est désormais à même d'en comprendre les grandes lignes mais surtout l'ennemi se dévoilera à nous et le moins que l'on puisse dire c'est que l'idée de son incarnation séduit. C'est donc très confiant qu'on enchaîne avec la suite puisque les éditions pika ont été assez éclairées pour prévoir une sortie simultanée des deux premiers opus afin de ne pas provoquer chez les lecteurs un sentiment de trop peu, bien vu !

" Un second tome se poursuivant sur une très bonne dynamique et confirmant le potentiel d'un shônen sur lequel on n’aurait pas spécialement parié au début de sa lecture"

On retrouve notre exterminateur obligé de recruter et de se lier avec de nouveaux compagnons encore et encore au vu de la particularité de son pouvoir. Cette dernière justifie à elle seule sa façon d'être qui en se donnant un air faussement désintéressé tente de ne pas se laisser submerger par l’horreur de sa situation et de ne pas sombrer dans la folie. Le panel de personnage se renouvelle donc assez vite ne laissant pas vraiment aux lecteurs le temps d'apprendre à les connaître ou de réellement s’y attacher. Cela dit outre Tolza, certains autres personnages assez intéressants vous faire leurs apparitions permettant déjà à l’intrigue de décoller en quelque sorte.

En premier lieu, on aura ce fameux comité d'observation doté d’agents qui vont chacun suivre les agissements de l'exterminateur qui leur a été attribué. Au début, l'auteur va nous amener à penser qu'elles font partie de l'autorité en place en veillant à exercer un certain contrôle sur leurs partenaires sauf qu'il va très vite nous faire comprendre que leur situation n'est pas aussi simple et qu’elles risquent leurs vies dans l’accomplissement dans leurs devoirs. À travers leurs histoires respectives, le climat va devenir assez vite angoissant d’autant plus que celui qui les chapeaute est un pervers complètement fêlé ajoutant à lui tout seul un grain de folie au récit. Une sorte de lien de confiance va alors se développer entre Tolza et son observatrice rendant celui-ci plus accessible et plus attachant surtout lors de ses confidences auprès de cette dernière. L’autre très bonne idée viendra du fait de placer également un observateur auprès de l'Incarnation du roi du mal permettant ainsi à ceux qui se placent tout au-dessus de la hiérarchie de ne pas perdre une seule goutte de cette tragédie humaine. On va donc ainsi assister à leurs premiers carnages et ils ne vont clairement pas faire dans la dentelle. Deux éléments ont cependant attirés mon attention, le leader est doté d'une personnalité assez étrange mais dans le bon sens du terme, il va à plusieurs reprises nous étonner par sa maniabilité le rendant presque attachant hors qu'il est tout de même censé représenter le mal laissant ainsi le lecteur désarçonné par son propre ressenti. Deuxièmement, on comprend enfin le rôle de la jeune fille apparue dans le premier tome qui se révèle véritablement intéressant à travers le dilemme auquel elle doit faire face. Le récit apparaît alors bien plus profond avec une réelle réflexion sur ce que sont en train de vivre les principaux protagonistes. On est donc très curieux de connaître sa décision et de voir comment son rôle va évoluer dans l'intrigue.

Enfin, Tolza va être confronté à la vision totalement différente de l'un de ses semblables. Un passage qui va tout remettre en question et ravir le lecteur tant la confrontation de notre héros avec son rivale se révèlera originale. En effet, il ne s'agira pas ici de mesurer leur force ou leur intelligence mais plutôt d’opposer deux façons totalement différentes d’accomplir leur destinée. On est donc une fois de plus charmé par ce que l’auteur nous propose et curieux de lequel des deux l'emportera. Vous l’aurez  compris ce second tome foisonne de bonnes surprises !

Un petit mot sur les graphismes, le trait de Tellmin’ s’inscrit bien dans le genre shonen et se révèle assez plaisant dans son ensemble. On notera également une bonne dynamique dans la mise en scène des évènements avec des scènes d’actions lisibles et des passages où l’émotion qui prime est justement retranscrite. Le chara-design peut paraitre assez simpliste mais reste assez varié et maitrisé sauf les démons de classe inférieur pour lesquels on sent clairement que l’artiste manquait d’inspiration. Pas de mauvaise surprise de ce côté-là donc, agréable ! Rien à redire sur l’édition mise à part la très bonne idée d’avoir prévu une sortie simultanée des deux premiers tomes et qui m’est apparu vraiment nécessaire puisque l’intrigue ne démarre réellement qu’à la fin du premier opus.

snoopy

Lectrice assidue et dévoreuse de mangas à plein temps. Collectionneuse dans l'âme, jamais rassasiée au grand désespoir de mes proches.
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